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Carrefour pourrait-il perdre son rang de deuxième distributeur mondial ?

En tout cas, l'heure est aux grandes manœuvres chez Carrefour. Sous la pression de ses deux principaux actionnaires, le fonds d'investissement Colony Capital et Bernard Arnault, propriétaire de LVMH, qui détiennent à eux deux 13,5 % du capital, le groupe envisage de céder ses activités dans les pays émergents.

Les deux actionnaires cherchent une solution à même de doper le cours de Bourse de la société. L'action Carrefour a baissé de près de 30 % depuis leur entrée au capital en mars 2007. Soit des millions d'euros partis en fumée pour les deux investisseurs. Pour cela, ils tentent de convaincre depuis plusieurs semaines l'équipe de direction de Carrefour et le Conseil d'administration de céder les filiales asiatiques et sud-américaines.

"Colony et Bernard Arnault, sont convaincus du bien fondé de ce scénario, ils mettent une pression gigantesque pour trouver une solution à leur infortune, indique une source proche du dossier. Ils voudraient aboutir avant la fin de l'année." Face à eux, certains dirigeants et administrateurs tentent de repousser ce scénario.

Sébastien Bazin, patron du fonds Colony pour l'Europe, se dit, lui, "étonné" à l'évocation de tensions avec le management. "Les relations entre Lars [Lars Olofsson, le directeur général de Carrefour depuis janvier] et Blue capital [la structure qui regroupe Colony et Bernard Arnault] sont, depuis le début, excellentes", indique-t-il au "Monde". Et si un plan de refonte de la stratégie est effectivement à l'étude, piloté par M.Olofsson, "nous sommes dans un plan à quatre ans, nous avons jusqu'en 2012, nous avons le temps", assure M.Bazin.

Plusieurs sources proches des dirigeants confirment toutefois l'information, précisant que les actionnaires souhaitent ainsi réaliser de coquettes plus-values sous formes de dividendes exceptionnels.

La vente des implantations de Carrefour dans les pays émergents a déjà été envisagée par le passé, à la fin du mandat de Luc Vandevelde, président de Carrefour de 2005 à 2007, confie un banquier. "En terme de stratégie, c'est contestable mais d'un point de vue financier, l'opération est juteuse", explique-t-il.

C'est, en effet, dans les pays émergents que la croissance du groupe est la plus élevée et porteuse d'avenir. En Amérique latine, elle est de plus de 20  et d'un peu plus de 10 % en Asie, alors que les ventes et les profits stagnent en France ainsi que dans la plupart des pays européens. La vente des activités de Carrefour en Amérique du Sud serait une idée plus aboutie que celle de l'Asie et notamment de la Chine, important gisement de profits à long terme. Selon nos informations, la valeur  des activités de Carrefour en Amérique du Sud peut être estimée entre 3 et 5 milliards d'euros, celles du groupe en Asie entre 4 et 6milliards.

"UNE CATASTROPHE"

L'idée de céder les pays émergents, a été réactivée en raison de l'impossibilité, pour MM. Bazin et Arnault, de mener à bien rapidement leur projet initial: céder le patrimoine immobilier de Carrefour. Colony et Groupe Arnault, ont en effet depuis l'origine la volonté de céder les "murs" des magasins de Carrefour, regroupés dans la structure "Carrefour Property", dont la valeur est estimée à 14 milliards d'euros. Cette opération reste à l'ordre du jour mais le retournement du marché immobilier l'a rendu complexe.

Pour nombre d'observateurs, l'option envisagée aujourd'hui suit une "logique d'actionnaires" comparable à celle mise en œuvre au sein du groupe hôtelier Accor au printemps. Confrontés là aussi, à la chute du cours de Bourse, le fonds Colony avec son homologue Eurazeo, principaux actionnaires, ont appuyé le projet d'une scission entre les activités d'hôtellerie et de services (ticket restaurant) du groupe, sans toutefois décider de les vendre. L'opération s'est immédiatement traduite par une hausse du cours de Bourse du groupe, le marché estimant que la distinction des deux entités permettait de mieux les valoriser.

Le projet conçu pour Carrefour s'il était mené à son terme, serait-il aussi bien accueilli ? "C'est une catastrophe de vendre les émergents, cela ne répond qu'à une logique financière de profits à court terme, au mépris de la logique industrielle", juge un banquier.

En outre, l'activisme de Colony, adepte de "coups" financiers, qui a poussé à l'éviction de José Luis Duran, l'ex-patron de Carrefour, débarqué en 2008 pour ses mauvais résultats boursiers, suscite de vives critiques au sein du patronat. Avec une participation minoritaire, Colony tente en effet d'imposer ses vues au management se livrant à ce que d'aucuns qualifient de "prise de contrôle rampante". "Ils veulent diriger sans en payer le prix, au Royaume-Uni cela ne serait pas toléré", signale un spécialiste de la gouvernance.

M. Olofsson, interrogé par le Journal du dimanche du 30 août, assurait, lui, être le véritable décideur chez Carrefour : "Discuter avec des actionnaires aussi engagés est une force. Ils jouent le rôle de partenaires même si les décisions m'appartiennent."


lemonde.fr
Tag(s) : #Carrefour
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